Hubert Giot

Quand êtes vous rentré au GMHM ? Vous êtes le recordman de longévité au Groupe (au total 18 ans ?), comment fait on pour garder la motivation pendant toutes ces années ?

Je suis rentré au GMHM en 1977, au sein duquel je suis resté exactement 16 ans. La motivation est parfois fluctuante, mais il faut savoir rebondir sur des évènements heureux ou malheureux. Pour ma part l’esprit de groupe a pesé lourd dans ma motivation.

Comment êtes vous arrivé au GMHM ? Quel était votre parcours antérieur ?

Je suis arrivé au GMHM par des chemins détournés, la course à pied d’abord ou j’évoluais au niveau national, au sein du 159e RIA à Briançon, sur 3000 steeple, en cross et sur semi-marathon. Les WE hors compétition, j’accompagnais un camarade très doué en alpinisme, qui me faisait faire des courses extrêmement difficiles dans lesquelles j’essayais de ne pas le retarder. J’aimais bien cette notion d’engagement, et de dépassement de soi et rapidement, j’ai hésité entre les deux activités.

La note amusante est que j’ai demandé les chasseurs alpins lors de mon engagement au sein de l’armée, et j’ai été refusé pour manque de condition physique, je me suis donc retrouvé dans les troupes de marine.

Quelle est votre activité professionnelle en ce moment ?

Mon activité se partage entre l’activité de guide, de moniteur de parapente, et de moniteur de ski.

En plus de cela je travaille dans l’évènementiel et je m’investis dans des associations.

Que pensez-vous que votre passage au GMHM vous a apporté ?

Les années de groupe apportent beaucoup dans les activités civiles, car on a peur de rien, et on a l’esprit d’entreprise. Mais il y a un revers à la médaille: l’activité professionnelle civile est pleine de méandres et de détours et la franchise n’est pas toujours une valeur première.

A quelle expédition du Groupe avez-vous participé ?

Il serait plus facile de me demander celles auxquelles je n’ai pas participé, je vais donc répondre globalement, 13 expéditions.

Pouvez vous nous parler d’une expédition en particulier (organisation, problème logistique ou administratif, voyage,.) que vous avez faite avec le Groupe?

Je pense au Thalay sagar en inde, où la face était extrêmement difficile et le dédouanement des bagages aussi. Nous tournions avec JC Marmier depuis trois jours, dans les bureaux des douanes, et alors que nous cherchions la bonne pièce, nous avons aperçu une vache dévorant copieusement une pile de dossier. Nous avons alors espéré que ce n’était pas le nôtre.

Comment caractériseriez vous le GMHM ?

Le GMHM est une grande partie de ma vie, j’ai appris en son sein des valeurs fondamentales, que sont le courage, le dépassement, la volonté, et l’amitié. Je pense sincèrement que je serai marqué à vie par ces expériences. Je suis heureux que cette unité d’élite, qui a donné son sang pour faire passer ces valeurs, vive encore et porte toujours plus loin notre flambeau.

Comment fonctionnait le Groupe du point de vue des prises de décision ?

Le groupe a cette particularité de fonctionner par consultation. On rentre au groupe si la majorité l’accepte, en quelque sorte par cooptation. Et les prises de décisions (choix d’expé, faut il faire le sommet malgré les conditions etc) se font par consultation également, la décision finale appartenant toujours au chef et à l’adjoint qui se consultent après.

Quel est, à votre avis, le principal enjeu du GMHM pour les prochaines années ?

Il appartient au GMHM seul de définir son propre challenge, de toute évidence, il s’orientera avec pertinence – comme nous l’avons toujours fait – vers ce qui fait évoluer l’homme et la pratique de la montagne.

Avec le recul que vous avez aujourd’hui, quel est le moment de votre passage au Groupe dont vous vous souvenez le plus volontiers ?

Mon meilleur souvenir hormis le sommet de l’Everest est mon échec sur ce même sommet par l’autre versant. Il m’a renvoyé faire mes gammes et m’a inculqué l’humilité.

Quelle est votre plus belle course dans les Alpes avec le Groupe ?

J’ai deux souvenirs marquants, la Face Nord de l’Eiger avec Esteve où nous avons cassé 3 piolets sur 4 et sommes sortis dans le mauvais temps, et l’ouverture de la directissime française au Drus avec Sachetat où il nous est arrivé une grosse mésaventure.

Pouvez vous nous faire partager une expérience marquante que vous avez vécue au Groupe ?

La deuxième fois ou je suis allé dans la FN de l’Eiger par la directissime, c’était en hiver et je sortais du monitorat de ski. 12h plus tard j’étais en train de bivouaquer dans une grotte de glace en pleine face, la transition fut difficile.

Vous souvenez-vous d’une anecdote ou d’une scène insolite de cette période ?

Une scène insolite non, mais plusieurs oui, elles tournaient toujours autour de nos disputes avec JC Marmier, qui étaient parfois très violentes, avait il tord ou raison, je ne saurais le dire, mais à l’évidence, il nous aura poussé dans nos retranchements, et nous aura permis de réaliser des exploits.

Souhaitez vous évoquer quelque chose en particulier dont nous n’avons pas parlé ?

J’aimerais, qu’une fois, les pionniers du groupe encore vivants se joignent, s’ils le désirent, à une expé organisée par les nouveaux: ce serait symboliquement fort.

Je suis de nature pacifique, mais il m’est arrivé de devenir très virulent, lorsqu’on disait du mal du groupe, tant avec des militaires qu’avec des civils. C’est une expérience unique et un honneur immense d’avoir appartenu à cette unité.