Christophe Profit

À quelle période étais-tu au Groupe ? Pourquoi avoir re-signé ?
Je suis arrivé au groupe en octobre 1982 et j’y suis resté deux ans. Après la période de service obligatoire, j’ai re-signé pour un an : ça me permettait de m’entraîner à un haut niveau tout au long de l’année dans une structure qui me convenait.

Comment es tu arrivé au GMHM ? Quelle était ta situation antérieure ?
Juste avant, j’étais lycéen (je venais de rater le bac) et c’est Dominique Radigue qui m’avait parlé du GMHM. Il m’avait expliqué son fonctionnement et que je pouvais y effectuer mon service militaire, je n’ai alors pas traîné pour envoyer ma lettre de demande au commandant Marmier. J’étais très motivé !

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Comment est venue cette idée de la « directe » ?
En fait, quand j’étais gamin, j’avais imaginé remonter la face ouest des Drus à la vitesse d’un marcheur…

Peux-tu raconter cette aventure de la « directe américaine » en solo. (préparation, déroulement, bref l’envers du décor …) ?
J’avais fait plusieurs reconnaissances de la voie avec des compagnons de cordée du groupe : notamment l’ouverture d’une variante à droite du dièdre de 90 mètres, qui évitait le fameux pendule, avec les frères Escoffier ; également avec François Marsigny nous avions fait la voie intégralement peu de temps avant le solo… Physiquement, je m’étais surtout préparé en grimpant intensivement, j’avais fait également beaucoup de travail foncier en footing et ski de fond. Côté hygiène alimentaire je faisais aussi attention. Et j’étais très très motivé, le mental a énormément joué.

Avais-tu une responsabilité spécifique au sein du Groupe ?
Non, pas spécialement.

Quelles courses marquantes as-tu réalisées pendant tes deux années ?
L’expédition au Pôle Nord avec l’ascension du Mont Thule, la première solitaire intégrale de la face ouest des Drus, l’enchaînement en solo des faces nord des Droites, de Talèfre et des Grandes Jorasses, la Directissime française aux Drus…

C’est aussi le début de tes enchaînements, peux-tu en parler ?
En fait, ce premier enchaînement a déclenché les suivants… J’aimais beaucoup cet exercice qui allie technique, endurance et engagement.

Quelle est ton activité professionnelle en ce moment ?
Guide de haute montagne. J’adore ce métier qui a toujours été le fil conducteur de ma vie.

Que penses-tu que ton passage au GMHM t’a apporté ?
Le GMHM m’a donné les moyens de vivre ma passion intensément, comme je le voulais à ce moment-là. J’ai pu m’exprimer pleinement et ça m’a permis de renforcer ma passion et mon engagement.

Que penses-tu avoir apporté au GMHM ?
? ? ?

Comment caractériserais-tu le GMHM ?
Un tremplin dans ma vie d’alpiniste, et d’homme aussi.

Comment les décisions étaient-elles prises au Groupe ? Quels étaient tes rapports avec Marmier ?
Il nous prenait sous son aile, un peu comme un « père ». J’avais confiance en lui, et il me faisait confiance. Il a été d’un grand soutien dans la préparation de chaque réalisation. Lors de l’enchaînement Droites, Talèfre, Jorasses, il m’avait accompagné pour déposer du matériel et des vivres (les fameuses bouillies Vivanco !) au-dessus du refuge de Leschaux…

Quels étaient tes compagnons de cordée de l’époque, peux-tu en parler ?
Il y avait François Marsigny, Eric Escoffier, Jean-François Hagenmuller, Vincent Fine, Eric Grammond, Hervé Sachetat, Jean-Dominique Seguier, Hubert Giot, Pierre Royer… Je garde d’excellents souvenirs avec chacun d’entre eux, riches humainement et en émotion.

Te souviens-tu d’une anecdote ou d’une scène insolite de cette période ?
Je me souviens particulièrement de la remontée du Linceul aux Grandes Jorasses avec Eric Escoffier : nous avions grimpé en solo côte à côte, et nous avions bavardé tout le long !

Quel est ton meilleur souvenir au Groupe ?
Quand j’ai reçu la lettre d’admission au Groupe, j’étais fou de joie !

Quel est, à ton avis, le principal enjeu du GMHM pour les prochaines années ?
Je crois que le principal enjeu est d’essayer de faire mieux comprendre l’alpinisme, sous toutes ses formes, au grand public. Le projet sur tous les continents va dans ce sens-là, l’alpinisme n’est pas une discipline quantifiable, il faut plutôt jouer sur la technicité et l’esthétisme.

Pourrais-tu nous commenter l’évolution de l’alpinisme de haut niveau telle que tu la perçois ? On a l’impression que les années 80 ont été des années folles dans l’alpinisme, on a aussi l’impression que vous avez atteint les limites ?
Il reste encore beaucoup à faire et à découvrir… Rien n’est figé, avec du talent et de l’imagination, les alpinistes de chaque période peuvent accomplir de grandes et belles choses.

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